Impact de la sécheresse...
Les prévisions météo donnaient une fenêtre de 3 jours de beau temps, suivis d' une pluie orageuse et abondante ce jeudi... J'ai donc fait du foin dont une grosse journée hier afin d'avoir tout pressé à la nuit ! Il y eu les 3 jours de beau soleil et chaleur, mais de pluie pour ce début d'après midi, point ! A 8 heures, les prévisions pour la journée changeaient et se transformaient en risques d'averses, histoire de ne pas se démentir complètement...
J'ai quelque peu abandonné le blog pendant 3 jours pour cause de participation à des réunions le soir, ainsi que lundi midi ! A chaque fois, j'étais avec des paysans ! Cela commence de me donner une idée assez précise de la catastrophe qui s'annonce ! Couplée avec la constatation du peu de bottes récoltées ces deux derniers jours, j'ai du mal à garder un moral vraiment béton ! Le déficit en fourrages récoltés oscille entre 30 et 60% ! Tout dépend des terrains, des orientations ! Et cela ne tient pas compte des parcelles déprimées sur lesquelles dans beaucoup de cas, il faudra se poser la question de savoir s'il n'est pas judicieux de remettre les vaches plutôt que d'assumer les charges de récolte.
On va donc avoir seulement de 30 à 50 % des besoins pour nourrir les animaux l'hiver !!!
La grande question restante est de savoir, s'il pleut maintenant, si nous parviendrons à nourrir les animaux jusqu'à l'hiver ou s'il faudra nourrir au pré ?
Un hiver, du 15 novembre au 15 avril nécessite 4 équivalent bottes de foin par jour. Pour 130 j, cela fait donc 520 bottes, car on gagne quelques jours de lâcher ou en rentrant plus tard ! Le point de rupture, c'est à dire le moment où il faudrait donner à manger dans les prés est déjà arrivé chez les plus chargés ! Ici, je devrais y être dans une dizaine ou une quinzaine de jours ! C'est là où j'ouvrirai les parcelles déprimées soit un quart de la surface prévue en récolte ! Me privant ainsi d'autant de bottes pour l'hiver !
Donc l'inconnue tient à la nourriture des animaux du 10 juin au 15 novembre ! 160 jours à raison de 10 kg de matière sèche par vache par jour... Tout dépend des repousses éventuelles d'herbe. Je peux, au pire, avoir besoin de 4 bottes par jour, soit 640 bottes ! La raison peut laisser penser qu'on peut être dans une situation intermédiaire avec la moitié seulement ! Un équivalent 320 bottes de paille doublées d'un aliment sécheresse ! Disons 7 kg de paille et 3 kg de concentré !
Pour l'hiver, je compte sur mon foin, le petit reste de l'année dernière et la paille de mes céréales ! Il faut, pour tenir, que je complète avec un concentré pour 12 t à la louche ! De plus, il me faut acheter la paille de litière, soit au moins 50 t.
Pour l'été, il me faut acheter de la paille et du concentré, sur l'hypothèse moyenne de dessus, cela fait respectivement 56 t et 24 t ... Comme il faudra faire des litières, j'ai annoncé 100 t en commande de paille, qui au regard de ce qui se dit dans les réunions, ne devrait pas être en dessous de 100 €/t rendue ici puisque je n'ai pas de fournisseur habituel. Pour l'aliment sécheresse, il n'y a pas de prix pour le moment, je vois mal comment, au regard des prix actuels des matières premières, on pourrait être en dessous de 2 € et quelques...
C'est donc entre 16000 et 20000 € que se situent mes besoins en trésorerie pour simplement nourrir les animaux et sauver le troupeau, dépense totalement inhabituelle qui va faire monter mon coût de production de 65 cts au kilo vif au minimum ! Je ne parle pas de finir... Ramené à la vache, cela fera entre 200 et 250 € ! Si on tient compte des pertes à la naissance, le prochain veau à naître coûte déjà entre 250 et 300 €, juste pour maintenir la mère en vie ! Pour vous donner un ordre de grandeur, avec les précautions d'usage, un veau au sevrage, sans complémentation peut être estimé entre 550 et 600 € et une laitonne aux alentours de 450 à 500 €.
A ce prix, on peut se demander s'il ne vaut pas mieux vendre des vaches ! D'abord pour avoir quatres sous pour acheter la nourriture nécessaire et ensuite pour en acheter moins et donc diminuer la perte à venir... Dans un premier temps, j'essaye d'anticiper les départs prévus d'animaux finis ! Mais déjà, alors que les cours s'étaient un peu améliorés depuis un mois par manque de marchandise, ils plongent à nouveau ! Belle opportunité en aval de se fournir à pas cher ( sans que cela ne se traduise en grande surface !) . Tout le monde fait comme moi ! Alors qu'il faudrait que la viande augmente de plus d'un euro pour compenser les achats nécessaires, le prix baisse...
Que faire ensuite ? Balancer des vaches reproductrices avant qu'elle maigrissent ? En finir plus tôt en espérant profiter de repousses d'herbe ? Pas si simple ! D'abord, il y a le prix de vente, un vrai soucis si on décapitalise car, trop bas, on perd des années de travail ou on ne pourra pas rembourser les emprunts. Deux, il y a les contraintes de la PAC; une partie des primes n'est pas découplées, on doit donc garder les animaux ! Trois, le plus important, il y a les veaux ! Il leur faut au moins 6 mois de lait de la mère !
C'est l'impasse totale !!!! Il n'y a pas de solution sérieuse. Ceux dont les femmes travaillent à l'extérieur sont contraints de négocier sur l'oreiller l'abandon de la participation financière à la vie normale du foyer ! Pour les autres, c'est l'enfer. Il reste les emprunts auprès des banques, à condition qu'elles soient d'accord de prêter en pariant sur une vraie remontée des cours l'année prochaine !!! Déjà qu'elles étaient frileuses ces dernières années...
Vous l'avez compris, même avec de la pluie maintenant, l'année sera catastrophique. Alors, si rien ne vient avant l'automne... C'est l'avenir de l'élevage familial qui est en jeu. Je scrute des mesures annoncées ! Et là...
Cela fera l'objet du prochain billet !