Paysans, même si...
Les journaux locaux se sont fait l'écho des soucis des viticulteurs du beaujolais. Je n'y ai pas trop porté attention. Mais hier soir, c'est une réflexion d'un ami, viticulteur sur la côte bourguignonne, qui m'a fait mal, très mal !
Il était en colère et le cachait mal. Il s'est exprimé avec ses mots, durs, très durs. J'ai pu ensuite parler un peu avec lui et comprendre ce qui lui arrive ! Depuis le froid, les viticulteurs en bavent. Les bois ont beaucoup soufferts du gel et de la bise. Puis l'année a été pluvieuse, propice au développement d'oïdium et de mildiou. A chaque fois, il faut intervenir très très vite. On m'a cité des cas de pertes totales du raisin en quelques jours car le traitement n'avait pas été fait assez vite. Les viticulteurs ont donc été sur la brèche tout l'été. La maturation du raisin a été retardée par l'été pourri et les vendanges ont commencé très tard, la semaine dernière, exposant la récolte aux conditions météorologiques de l'automne.
Je pense qu'il s'y attendait un peu mais qu'il espérait, comme nous le faisons tous, à une perte moins importante de récolte. Mais les premières parcelles récoltées ont des rendements de 50 %. La pluie de mardi et mercredi n'a rien arrangé. Le raisin s'abîme vite et il craint que le sol détrempé ne lui permette pas de passer avec la machine à vendanger. Peut être craint il également qu'il faille vendanger à la main pour trier le raisin s'il y a du pourri ? Sauf que la machine, si elle reste sous le hangar, coûte chère.
Il faut bien comprendre que pour eux, c'est l'année de travail qui est en jeu. Nous, ce sont les vêlages, pour d'autres, de façon moindre pour moi, ce sont les cultures... Le monde agricole ne travaille pas en récolte continue mais dans le cycle des saisons avec en permanence une épée de Damoclès au dessus de la tête. Ici une sécheresse, là la grêle, plus loin une inondation, là bas le gel... J'en passe et des meilleurs, mais à chaque fois, c'est toute la production d'une année qui se joue. C'est la condition de paysan, celle qui nous unis tous ou plutôt que nous supportons tous. Rien n'est jamais acquis...
Je sais que certains trouveront à redire, que ceci, que cela... Je crois qu'il nous faut respecter le désarroi des viticulteurs. Je ne sais pas comment être solidaire ? Ils ne touchent pas de subventions, mais dans le cas présent, je trouverai normal qu'ils émargent au fond des calamités. Car l'état ne se gêne pas pour pomper des impôts et des cotisations sociales les bonnes années. Alors, quand la bise est passée, il serait normal qu'il fasse un geste substantiel pour que ceux qui ont trimé toute l'année aient un soutien mérité... D'autant que les résultats des céréaliers et producteurs de colza vont être pléthoriques et vont donc rapporter beaucoup d'argent. Pour info, nous sommes taxés de la façon suivante : 43 % de notre bénéfice est prélevé au titre des cotisations sociales puis le reste entre dans les impôts du ménage. Nous n'avons pas d'assurance chômage et c'est tout le résultat de l'exploitation qui passe à la toise, pas que la partie qui concerne la rémunération du travail. Cela veut donc dire, que chez nous, les revenus du capital sont imposables au social et aux impôts sur le revenu. Quand j'entends certains prétendre que nous ne sommes pas imposés, les temps ont bien changé... J'aimerai voir la tête de certains qui nous reprochent toujours d'être protégés, si dans leur TPE ou PME, l'URSAF taxait autant le bénéfice que les salaires qu'ils se versent...
Mais cette solidarité ne risque pas d'être comprise quand on lit cela !
Il y a une explication à cette fanfaronnade, mais je ne la donne pas ! A chacun ses responsabilités.