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  • Paysan retraité, ancien éleveur de charolaises, qui regarde l'agriculture,les événements et la société depuis sa cour de ferme. Ma devise : " Prendre ce que la nature veut bien me donner. Vivre avec ce que les hommes me laissent !"
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7 août 2013

Pertes des repères dans la nature

La nature n'est pas un long fleuve tranquille, mais...

Je l'ai déjà conté, mais l'actualité de ces derniers jours me fait réagir. Tout l'été, de juin à la rentrée des classes, début septembre, il y avait un rituel chez mes parents. Tous les soirs ou presque, nous allions nous baigner dans l'arroux.

Il faut s'imaginer les travaux de l'époque ! Foins et moissons duraient des semaines et se terminaient vers la 15 août. Sueur et poussière collaient à la peau. Les journées étaient très longues, débutant vers 6 h en déchargeant des chars et s'achevant au crépuscule en chargeant les derniers du jour. Les tracteurs n'avaient pas de cabine, le soleil brûlait la peau et mes parents empêchaient systématiquement à tous ceux qui participaient aux travaux de se promener torse nu. " C'est très mauvais pour la santé !" Malgré ces précautions, malgré l'habitude, on prenait de coups de soleil, limités puisque la chair exposée l'était aussi.

Donc, le soir, on vivait le second meilleur moment de la journée, après les quatre heures pris plus tôt à l'ombre toujours près d'un ruisseau ou autre endroit frais près des parcelles du chantier et jamais à la maison quand il faisait beau. Donc, parfois à la nuit, on descendait tous, stagiaires et autres "présents " du jour compris pour un grand bain. Pas de cabines, mais les abris naturels pour se changer, de façon à ce que la poussière des vêtements ne salisse pas. Une fois en maillot de bain, premier bain ! Interdiction de plonger ou de sauter dans l'eau : " Vous entrez doucement, votre corps doit s'adapter à la température..." Une fois mouillé, on revenait au bord pour se savonner avec du savon de Marseille et se faire un shampoing. J'imagine la tête de certains aujourd'hui, nous taxant de pollueur sans se rendre compte que leur douche s'écoule bien quelque part et que tout n'est pas retenu dans les stations d'épuration... C'était d'abord de la poussière !

Ensuite, vraie baignade, le temps qu'on voulait. On connaissait tous les trous de la rivière, les endroits où on pouvait plonger... On nageait et il y avait toujours un adulte qui restait dans l'eau tant que les enfants l'étaient. Il n'y avait pas de brassards à l'époque mais des bouées pour ceux qui ne savaient pas nager et qui n'avaient pas le droit d'aller là où ils n'avaient pas pied. On s'apprenait mutuellement à nager. On respectait les règles, non par simple obéissance, mais parce qu'il était évident que la rivière si calme pouvait être dangereuse. Oui évident ! Les jours de répit, on descendait se baigner, jamais en pleine chaleur. On avait droit au tuyau d'eau d'arrosage pour se rafraîchir en début d'après midi. La rivière,c'était au moment où la chaleur décline, forcément 4 heures au moins après le repas pour éviter l'hydrocution...

Je garde un souvenir délicieux de ces moments là. On s'habituait à la température de l'eau de la rivière, jamais très chaude, au fil des jours. Lorsque j'ai évoqué cela, une amie récemment m'a dit qu'elle avait vécu la même chose dans son enfance à 30 km d'ici. Mêmes règles, pas pesantes non plus puisqu' on savait que tout peut être dangereux si on ne prend pas quelques précautions. Même plaisir et même mou dubitative de nos enfants le jour, où emballés par nos souvenirs, on les a respectivement emmené sur les lieux de nos forfaits " L'eau est trop froide, c'est pas bien propre ..." On a oublié le naturel, aujourd'hui l'eau doit être désinfectée, il ne faut pas de vase, il faut quasiment une cabine pour se changer car les orties piquent, et un accès bétonné pour les pieds... Je ne propose plus de baignade sauvage depuis belle lurette. Il faut dire qu'aujourd'hui, je travaille seul l'été et que seul, c'est moins sympa. Une fois, j'y suis retourné un soir à la nuit en moto. Même rituel, dans la plaine. Sur la berge en face, il y avait des gens qui faisaient un barbecue ! Lorsque je me suis lavé, j'ai entendu des réflexions : " C'est sale" "Quel sans gêne..." Je me suis demandé si je n'allais pas me retrouver avec les gendarmes pour me verbaliser ! Je suis sûr que certains n'hésiteraient pas à téléphoner... Les notions de pollution sont à géométrie variable, plus stupides et fausses qu'on est éloigné de la nature...

En écoutant les informations dans mon tracteur ces derniers jours et cette énumération macabre des noyades dont on se met à parler dans les médias, faute d'autres sujets, j'ai pris peur. On sent bien que les responsables hésitent entre fatalisme et répression. Pour d'autres sujets, on a bien inventé des permis, des interdictions, des obligations de clôtures ! Notre droit est ainsi fait que je suis responsable de ce qui peut arriver dans les points d'eau de la ferme. Quand on écoute, bien souvent pour ne pas dire tout le temps, les tristes événements sont d'abord dus à des imprudences. Méconnaissance des lieux, mépris des dangers. On est en vacances, donc rien ne doit limiter les activités. Il est évident qu'une mer formée est dangereuse mais il n'est pas normal qu'il y ait du vent ou des grains. Certains ont besoin de défier la nature pour se prouver qu'ils sont des hommes. Bref, on lâche dans une nature, qui restera toujours hostile, des gens qui ne la connaissent plus. Tout devient encore plus dangereux et du coup, par précaution, la tentation est énorme de réglementer encore plus. J'ai même entendu un vacancier ou un responsable politique ( J'ai aussi découvert qu'on avait une ministre du tourisme !) dire à la radio, qu'il fallait "interdire et verbaliser toute baignade en dehors des zones surveillées et en dehors des heures de surveillance". Autour de Paris, il est, d'après les interviews, quasi impossible de se baigner sans payer, donc on coupe les clôtures ! On confirme donc le tout payant, le tout contrôlé, le tout réglementé. C'est fou. Quand on va en vacances au bord de la méditerranée, nous ne nous baignons jamais en plein après midi, avec Mme PH. D'abord, il y a trop de monde, l'eau est douteuse... On nage le matin et le soir, à la tombée de la nuit. Moins de risques de choc thermique pour le corps, un vrai plaisir ! Je n'ai pas envie qu'on nous en prive ! On ne baigne pas avec une mer formée, cela nous semble tellement évident. Je veux qu'on nous laisse responsable de nos actes parce que c'est notre liberté.

Mais j'avoue que je ne sais pas comment responsabiliser les citadins vacanciers qui n'ont aucune notion des dangers et de leurs propres limites. Je suis stupéfait des comportements que j'ai vécu ici, sous des orages ou autres phénomènes climatiques, comme de leur comportement avec les animaux. Est on en train de perdre toute l'expérience humaine de l'homme dans la vraie nature ? Pour autant, j' espère que nos gouvernants nous laisseront encore des espaces de liberté et qu'on ne va pas se retrouver avec un permis de baignade à points, avec examen, certificats médicaux, timbres fiscaux lors des renouvellements...!

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Commentaires
M
Quelle est la fonction premiere de toute bureaucratie? C'est de s'agrandir, et pour cela, s'inventer et s'arroger toujours plus de pouvoirs. Et faire de tout le monde des coupables en puissance, car c'est plus facile a controler.
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C
L'Arroux est sans doute une rivière assez propre compte tenu de sa taille relativement importante (encore que cela dépend où on regarde et quels paramètres on analyse). Je n'ai pas les chiffres en main pour en discuter précisément.
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Y
"Sécurité ou Liberté" ... un slogan politique toujours prêt à ressurgir pour limiter puis monnayer les libertés individuelles.<br /> <br /> En contrepoint, le risque est totalement occulté par certains "consommateurs de nature", gavés d'images d'exploits et d'immortalité.<br /> <br /> Entre les 2, il y a moyen d'assumer ses responsabilités tout en se faisant plaisir.<br /> <br /> <br /> <br /> Comme toi j'ai connu le plaisir de la baignade dans la rivière et ça continue ! ;o)<br /> <br /> <br /> <br /> PS : les skieurs hors piste, on les classe où ?
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B
Je me suis moi aussi adonné au plaisir du bain dans la rivière, en famille, les soirs d'été. C'était dans l'Alène, pas très loin de chez vous, il y a bien trente ans maintenant. Ce sont des souvenirs inoubliables. C'était sans aucun doute plus sain qu'un bain de mer, aujourd'hui.
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I
je lis toujours avec plaisir..mais ce billet m'a fait remonter des souvenirs d'été : un de mes oncles agri, avait 2 étangs, en fin d'après midi, nous "amarrions" la chambre à air de tracteur" sur le toit de la 2 chevaux, et allions à l'étang..baignade , rigolade goûter, pause pour ma tante avant la traite..quand j'ai montré à mes enfants l'endoit : ils ont écarquillé les yeux..bien sûr la végétation a beaucoup poussé, puisqu'à l'époque les étangs étaient presque "neufs"..mais pas de risque pour eux : ils ne tenteront pas l'expérience!<br /> <br /> avec ta dernière phrase on n'est pas loin de la vérité pour certaines activités...
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