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  • Paysan retraité, ancien éleveur de charolaises, qui regarde l'agriculture,les événements et la société depuis sa cour de ferme. Ma devise : " Prendre ce que la nature veut bien me donner. Vivre avec ce que les hommes me laissent !"
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25 mai 2014

Directement concerné par le traité de libre échange transatlantique !

Ce traité, s’il aboutit, est il la mort annoncée de mon élevage ?

Depuis que j'ai eu vent, grâce à ce blog, de ces négociations, je me demande à quelle sauce je vais être mangé ?

Une première réaction ne peut qu’être pessimiste et me pousse à envisager la disparition de mon élevage ! Comment est produite la viande bovine aux US ? En feed-lot ! C'est à dire avec une organisation et une concentration d'animaux impossible à mettre en œuvre en Europe. Imaginez par exemple, le Harris ranch en Californie, 100 000 places sur 300 ha ! Implanté en plein désert, un tel élevage ne serait pas toléré en Europe. Les animaux ne mangent pas d'herbe, doublent de poids en 4 mois, non seulement grâce à une alimentation hyper riche, plutôt OGM, arrivant par trains entiers du meddle-west, mais également grâce aux hormones. Ces dernières permettant au passage d’inhiber les "passions amoureuses" des animaux qui rendent impossibles les concentrations d'animaux sans accidents... Les coûts de production d'un tel système sont au minimum de la moitié des miens. Les frontières ouvertes signeraient donc ma disparition inévitable en tant qu'éleveur "traditionnel"!

Cette réaction est sans appel; le traité ne doit pas se négocier ! Ou, s'il l'est, les normes d’élevage et de la filière françaises doivent s'appliquer aux US ! Cette dernière ligne est défendue par certains, comme si les USA allaient changer leur façon d’élever sous la pression de la France... Bref, on ferme les frontières et on s'oppose. Ou on autorise les hormones, OGM... Ce qui est sans doute l'objectif des grandes firmes multinationales.

Le billet de J.Q. est clair : Il est peu probable que les états européens bloquent le projet de traité. "les États-Unis...sont le premier marché à l’exportation des Européens (267 milliards d’euros, soit 17 % de leurs exportations)" ! Pire pour moi, dans ces 17 %, il y a des produits agricoles (champagne par exemple...). Il y a donc bien peu de chance pour que les intérêts de productions agricoles non subventionnées soient sacrifiées au profit d'une production qui l'est. Nous sommes rôdés aux discours politiques rassurants qui restent sans lendemains. La déclinaison française envisagée de la réforme actuelle de La PAC en est un bel exemple : Promesse d'une hausse des aides se traduisant par une baisse de 9 %!!!

Une autre tendance lourde pose problème. Sous prétexte de défense du pouvoir d’achat des français, tout le commerce de la viande bovine en grande surface , en restauration collective et pour la transformation s’articule autour du seul prix, le plus bas possible en l’occurrence. C’est d’ailleurs ce qui a conduit aux crises sanitaires, la viande de cheval, moins chère, retrouvée dans les lasagnes, en est le dernier soubresaut. La tentation de pouvoir s’approvisionner en viande hormonée beaucoup moins chère pourrait être grande pour certains maillons de la filière. Il y a donc sans aucun doute des partisans de cet accord, même en France. Il sera facile de le faire discrètement car le paradoxe est que la viande bovine est un des produits alimentaires les mieux tracés en Europe en terme sanitaire et l’un des moins en terme d’information commerciale. C’est un héritage du passé que la filière n’arrive pas à dépasser…

Tout concourre donc au rejet pur et dur, et tout indique que le pire va arriver ! Le pire ? Deux ou trois règles commerciales pourraient aussi devenir des atouts. Imaginons que le traité, pour répondre aux exigences de sécurité alimentaire, stipule pour ma production que l’étiquetage puisse porter des mentions obligatoires et claires pour le consommateur. Par exemple, animal nourri avec ou sans aliment OGM, viande hormonée ou non, date d’abattage pour connaître les délais de maturation, type d’animal… Bref des informations qui permettent réellement de justifier les écarts de prix auprès des consommateurs qui pourraient ensuite choisir sans crainte de supercherie. La concurrence ne serait plus tout à fait la même et je serai à nouveau en position de défendre mes produits. Comme peut le défendre un vigneron produisant un vin de qualité protégé par une appellation ! Cela nécessiterait nécessairement une adaptation de la filière française et européenne. Mais si cette adaptation se compare à celle de la viticulture AOC, non seulement elle peut nous être profitable à tous, consommateurs compris, mais elle peut aussi devenir une vraie valeur et une référence sur le marché mondial. Sans tomber dans un optimisme béat, un traité bien négocié peut être un plus, à condition de défendre les bonnes clauses et que la filière s’adapte et ne soit pas tentée par l’utilisation de viande hormonée, de façon insidieuse, pour jouer sur les prix d’achat…

Si je n’ai pas été trop compliqué dans mes explications, vous pouvez comprendre, par l’exemple, ma crainte, légitime qui, si je ne la dépasse pas, pourrait me pousser dans les bras d’un vote populiste. Changera t'il vraiment quelque chose ? Je ne le crois pas, c'est de la poudre aux yeux. Si on se coupe du reste du monde, à qui vais je vendre les 70 % des animaux de ma ferme aujourd'hui exportés ?

Si je me projette plus avant et essaye de me dire qu'il faut anticiper, au contraire, mon vote ira vers un parti qui soit capable de défendre les vrais enjeux. Je sais, l'offre politique n'est pas terrible. Bien sûr, il y aurait alors une vraie adaptation de la filière à engager, bien moins compliquée toutefois que la révolution verte des années 60.

Mais est ce que le statu quo de la situation actuelle, maintenant ma production sous perfusion de subventions, est plus durable à 5 ou 10 ans ? Quoique l'on pense de ces négociations et de leur opportunité, on sent bien qu'il faut que les curseurs bougent, même sans elles... Mieux vaut ne pas compter sur les politiques, qui ont donné leur accord pour cette négociation (les français ont juste exigé l'exception culturelle) pour nous en sortir, mais nous prendre en charge et anticiper !

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Commentaires
Y
Excellente réflexion (comme d'hab) - La mondialisation c'est la normalisation, alors il vaut mieux être pro-actif et se défendre positivement pour avoir un peu de son terroir, de son engagement, pris en compte dans les rapports de force qui président lors de discussions de traité de libre-échange. En France, et dans chaque région, nous avons des atouts à faire valoir ! <br /> <br /> Belle dynamique de mobilisation dans ta conclusion. A suivre ...
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K
Je pense qu'un traité valorisera les producteurs de circuits courts et de produits labellisés. Un certain nombre de label existe en bovin pour les animaux finis.
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E
"J'ai de plus en plus mal ! " dit la belle France en se tenant les pâturages et les labourages. On pourrait presque dire que notre belle France a une terrible mammite... et moi, je n'aime pas quand la France a mal. :(
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A
Un article trés clair .Bon ,,on a voté ! Il manquait quelques bulletins sur les 25 .j'espère que les élus de L'Europe sauront défendre un peu le label "Charolais "qu'il soit Charolais de Charolles ou Charolais du bourbonnais ( lol) .Bon courage à toi et à tous les agriculteurs qui veulent produire de la qualite !
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H
Hop, c'est partagé un peu partout, j'espère vraiment que ça aidera ! Et merci pour tes articles qui nous informent, vraiment.
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