paysanheureux

06 décembre 2022

Peut-on de sauver les services publics en ruralité ? (4)

Un des choix les plus importants de ma vie d’élu fut celui de l’intercommunalité. Important, car dans le temps, les conséquences sont énormes et l’avantage de court terme peut être désastreux à long terme pour un territoire.

Pour simplifier, nous avions le choix entre être absorbé par une communauté urbaine de 90 000 Habitants ou fusionner avec une interco de même taille que nous, pour passer de 15 000 à 30 000 habitants. Cette dernière hypothèse pouvant se terminer à terme par un regroupement à la prochaine réforme avec une autre interco très rurale rassemblant le charolais ! Donc, en tenant compte du coup d’après, quel était notre intérêt ? Être une banlieue rurale éloignée de 2 villes de 30 000 habitants, sans pouvoir au final ? Ou être dans une structure de plusieurs villes plus petites avec un petit brin de pouvoir de décision ?

J’avais les SCOT dans un coin de ma petite tête, les jeux politiques également…  D’un côté, le risque d’un PLU à terme qui fige toute possibilité de développement immobilier de ma commune au motif de concentration dans et autour des deux grands pôles. De l’autre, un PLUI qui restreigne les choix mais ne les bloque pas si on se défend un peu…

A l’inverse, du côté financier, il n’y avait pas photo ! En entrant dans la communauté urbaine, la dotation par habitant passait à 160 €/an/habitant car on permettait à celle-ci de franchir le cap des 100 000 habitants. De l’autre, on passait de 30 €/an à 40 € ou 50 € en fonction des choix de mutualisation des impôts locaux ! Difficile de résister à de tels arguments … D’autant que pour les élus siégeant en intercommunalité, cela change au niveau des indemnités ! Il suffit d’aller voir les tableaux officiels. Mais en contrepartie, nous serions passés de 3 représentants de la commune à un seul, donc il n’y avait qu’un bénéficiaire éventuel mais on perdait 2 voix et la possibilité de se faire entendre un peu. Enfin, d’un côté on bascule dans un monde plus politique, où on peut faire carrière grâce à des revenus plus conséquents… Tandis que de l’autre, la part de quasi bénévolat restait majoritaire, avec plus de proximité des citoyens et moins de calculs dans les prises de position…

indemnités EPCI

Pour ce qui est de la dotation, la seule vraie question est : Que serait-il réellement redescendu au niveau de la commune ? Les frais de fonctionnement des structures sont énormes. Rien que lorsqu’on croise les équipes chargées de l’entretien des espaces verts, disons, pour être gentil, que ce n’est pas l’affolement au travail. Malgré les efforts réels des dirigeants pour qu’un minimum de travail décent soit réalisé devant les contribuables !!!  Et ce n’est que la partie visible de l’iceberg ! Cela restreint fortement l’envie de rentrer dans un tel système.

Quelle serait la partie restante permettant des investissements dans les petites communes ? Je n’ai pas la réponse. Je constate que certains présidents ont investi dans l’intérêt général de la population locale et du développement. Je pense à la boucle de la fibre qui traverse toutes les communes, procurant un avantage pour les entreprises et qui sert aujourd’hui de base pour les opérateurs pour les particuliers. Autre exemple, l’agrandissement du parking gratuit du TGV pour le bien du plus grand nombre, surtout quand on habite un village où forcément, il n’y a pas de transports publics… D’autres, au contraire, ont investit dans des barrières et des automates pour faire payer ce même parking aux habitants les plus éloignés. Cela a un impact réel avec le développement du télétravail dans notre région, où la proximité d’une gare TGV permet de participer à des réunions parisiennes régulières… Vu de loin, il y a donc toujours concurrence entre l’intérêt des communes rurales et les deux villes. Mais il ne faut pas oublier la guerre des chefs entre les deux grandes villes. Celle-ci s’est traduite, par exemple, par la perte des hôpitaux, tout du moins de leur prédominance. Alors que la communauté urbaine était le second pôle médical de la région, c’est une autre zone urbaine qui a détourné les médecins spécialistes grâce au plan hôpital de 1992 ! Maintenant, pour mon village, on doit faire 60 kms pour trouver des rendez-vous médicaux non généralistes !!!!

C’est donc au regard de tout cela que j’ai fait mon choix, pas par rapport à des appartenances politiques, dans tous les cas, ils étaient tous du même côté à l’époque ! J’ai donc choisi le rural mais j’avoue que je ne sais pas si c’est le bon choix ? Il faudra des décennies pour le savoir. En fait cela dépend des décisions qui seront prises par les successeurs et surtout des responsables politiques, locaux et nationaux ! Car pour finir, la liberté de décision dans une commune est très restreinte. Les budgets sont trop serrés et en perdant la taxe d’habitation, les élus sont encore plus sous les fourches claudines de l’administration. Dans ma commune, la part des impôts locaux du ressort des élus est passée de 50 % à trente et quelques… Tout le reste du budget de fonctionnement est constitué des dotations. La tendance que j’ai déjà évoquée est de pousser au regroupement pour soi-disant améliorer la situation de ces budgets de fonctionnement par des économies d’échelle. Je le répète, c’est un leurre !

Les investissements, enfin, sont entièrement tributaires des subventions, soit des départements, soit des régions, soit des « plans » de l’état ! Seules, les très grosses intercommunalités parviennent à avoir un vrai choix, c’est pour cela qu’on a autant de « métropoles » en France ! Car pour être dans le coup, il faut des personnes hyper compétentes en montage des dossiers administratifs, donc des services coûteux… Et pas question de sortir des sentiers battus, il faut être dans les lignes ou avoir un appui politique auprès du pouvoir pour faire rentrer le projet de force entre les lignes !

L’initiative locale est donc très bridée, faute de moyens financiers ! C’est vraiment dommage et même décourageant pour ceux qui voudraient faire bouger les choses.

A suivre…

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28 novembre 2022

Peut-on de sauver les services publics en ruralité ? (3)

Elu local de ma commune pendant 12 ans, le bilan côté évolution des services publics n’est pas fameux. J’ai vécu une fermeture de classe, la fermeture de la gendarmerie, le transfert en « ville » des demandes de passeport et de carte d’identité, une seconde fermeture de classe, la fermeture de la cuisine du centre hospitalier (les repas arrivent froids d’une cuisine centrale à 40 kms), la suppression des perceptions rurales (la nôtre était dans une commune voisine mais cela nous concerne tout autant), la fermeture du SSR… Je n’oublie pas la réduction des heures d’ouverture de la poste, qui sont si hiératiques qu’on trouve souvent porte close… On sait que d’autres services sont en suspens, je les cite pas pour ne pas donner des idées ! Les deux seuls points positifs sont le maintien de la maison des services et surtout, la rénovation de l’EPAD, obtenu aux forceps...

 

poste ferméehoraires poste

Vous comprendrez mon amertume ! Dans le bilan négatif, je reviens sur l’intercommunalité qui a pris de l’essor pendant mes fonctions surtout avec la loi NOTRe évoquée dans le dernier billet. Dans les faits, les communes dominantes sont surreprésentées et les petites communes sont minorées, éternelle opposition entre nombre de citoyens et taille du territoire ! L’objectif avoué en haut lieu, est de faire fusionner les petites structures sur le seul critère du nombre d’habitants. On veut sanctuariser des territoires en « réserves » au profit des structures dominantes. Dans les faits, l’intercommunalité est un marché de dupes pour les petites communes. Lors des transferts de compétences, l’intercommunalité locale a pris les équipements sportifs. Cela a permis aux 2 communes dominantes de transférer, entre autres, les piscines qui sont des handicaps financiers ! Le motif est valable puisqu’elles profitent aux habitants d’un secteur géographique plus large que les seuls citoyens de la commune dominante. Mais, dans le même temps, on n’a pas transféré les chemins ruraux qui sont le problème numéro 1 des budgets des petites communes, trop coûteux !!!! Pourtant, les citadins des communes dominantes les empruntent pour leurs loisirs, tout autant que les ruraux vont à la piscine. Pour résumer, l’intercommunalité est avant tout une extension de la base fiscale des communes dominantes à tous les citoyens du territoire !

Lors de ma seconde mandature, j’ai été obligé de voter des investissements dont 90 % des montants se sont fait au profit des deux communes dominantes ! Zones artisanales et industrielles, aménagements hydrauliques pour limiter les inondations dans ces communes sous couvert de GENAPI, la priorité des investissements est restée concentrée… Pour être honnête, il a été question que nous financions la fibre mais le département a pris le relai… Enfin les recettes venant des entreprises ou des commerces retournent intégralement aux communes sur lesquelles elles sont situées. Résultat, l’appartenance à une intercommunalité ne profite pas aux communes rurales.

J’en profite pour tordre le cou à une idée reçue chez nos grands technocrates. Dans les petites communes, les élus se débrouillent, ils n’ont pas ou peu de staff technique. Ainsi, je me suis retrouvé à transporter des panneaux en voiture pour mettre en place des déviations pour des accidents ou des incendies… Ou de trouver comment remettre en route la barrière du camping, ou de réenclencher les cumulus de la salle communale, ou … C’est ainsi le week-end ou les nuits, il faut agir, y compris gérer un chien écrasé ou tout simplement perdu qu’il faut emmener à la SPA… Cela prend un temps fou pour une petite indemnité d’adjoint de 300 €. En clair, rien qu’avec les déplacements, dont des réunions à l’autre bout du département, il ne reste rien ! Or, dans les agglomérations, ce sont des employés qui remplissent ces fonctions. Entre heures supplémentaires, astreintes et autres avantages de compensation, les coûts explosent…

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Mais le principal ou l’essentiel n’est pas là ! Les habitants connaissent les élus qui sont réellement de proximité dans les communes rurales. Ils savent où ils habitent et ils les sollicitent très facilement, ils ont les numéros de téléphone. C’est la plupart du temps en dehors des heures d’ouverture de la mairie. Avec parfois des problèmes insolubles comme la recherche d’une solution pour des soucis de voisinage… Le plus déroutant pour moi a été une fouine, (soi-disant apprivoisée ?) qui mangeait les câbles du faisceau de la voiture du voisin ! Mais surtout les élus portent une attention aux plus faibles ou en détresse… Ce sont eux qui avertissent des drames, eux qui préviennent les familles ! Eux qui cherchent des solutions en urgence de précarité. Dans tous les cas, les élus locaux prennent le temps d’écouter.  Oui, un élu rural remplit un peu toutes les fonctions qui pour certaines ne sont pas remplaçables par une administration ! Mais en haut lieu, on déplore un nombre d’élus trop nombreux, on n’imagine pas les services rendus. Qu’importe la médiocrité de la disponibilité des services externalisés en ville, comme l’histoire des cartes d’identité ou des passeports… Et j’en passe, mais on continue de pousser pour soi-disant être dans l’air du temps, la modernité passerait par la taille !

A suivre…

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18 novembre 2022

Peut-on de sauver les services publics en ruralité ? (2)

Quatre ans plus tard, pourquoi revenir sur cet événement ? Quel résultat du pari  ?

D’abord, entre les deux, il y a eu un accélérateur de situation. La COVID ! Brutalement, à la sortie du confinement, il y a eu une flambée des demandes immobilières dans le village. Hors de toute raison, des maisons se sont vendues en une journée. En quelques semaines, le marché immobilier local a été asséché. Cela s’est calmé depuis, heureusement… Conséquence (prenez le avec humour mais c’est une réalité) dans les rues, les poussettes ont remplacé les déambulateurs ! Qui dit poussettes, dit enfants donc école… Mais le recensement qui permet de déterminer les choix d’aménagement du territoire ayant eu lieu le mois avant la COVID, il faudra des années pour que ce rebond démographique soit acté par les instances dirigeantes…

N'étant plus en poste de responsabilité et ne faisant que de très courtes apparitions au village à cause de la COVID, j’ai moins de liens pour m’enquérir des situations. Mais une rencontre avec une ATSEM puis des contacts avec la directrice des maternelles m’a permis d’avoir des informations.

L’année de la suppression d’une classe, il n’y avait eu que 3 inscriptions. Depuis, nous avons retrouvé un rythme normal avec une quinzaine en moyenne et des « pics ». Les directrices jonglent avec des prévisions à fournir au début de printemps et des inscriptions réelles fin juin ! C’est un peu des parties de poker-menteur ! On comprend donc que l’inspecteur réagisse au quart de tour en voyant un nombre de trois et fasse le mort les années suivantes. Tout comme il est compliqué pour les directeurs et directrices de donner des chiffres prévisionnels précis, faute de fichiers !

On est là dans l’absurdité administrative totale qui fait du passage à vide d’une année, un couperet décisif. Si on revient à la conclusion du billet précédent, où on nous demandait de nous engager sur un nombre d’enfants dans le futur, on mesure les limites du système. Si on suit la logique, pour le bon fonctionnement administratif, on imagine les prochains nouveaux formulaires à remplir. Les parents devraient inscrire leurs enfants à l’école dès la naissance. Certains parents les inscrivent bien à la crèche dès la confirmation de grossesse dans les villes !!! Donc, pourrait venir le temps, où il en ira de même pour l’école ! Après ce que nous avons vécu ces dernières années, je suis certains que certains hauts fonctionnaires trouveraient cela plus facile pour gérer ! Que vaut la liberté individuelle aujourd’hui dans les ministères dès qu’il y a un problème ? On règle des problèmes au coup par coup, sans vison à plus long terme (cf. obligations pour les internes en médecine de faire une année d’étude supplémentaire pour masquer des années de démolition administrative de la médecine.)

L’inspecteur rencontré il y a 4 ans est parti à la retraite. Je suppose que son successeur ne sera pas tenu par les promesses antérieures et se contentera d’avaliser la situation. Pour lui, les compteurs sont remis à zéro.  D’où la déception de ceux qui suivent le dossier dans notre commune, « les faits ne semblant pas être concordant avec les discours ». Il faudra ramer des années pour une réouverture éventuelle !!!!

evolution démographie 2007 2017

Evolution démographique 2007/2017

Quand on habite dans la diagonale de la déprise démographique de l’ex-DATAR, qui part de la Lorraine pour rejoindre le limousin, on a l’impression d’être pris dans un tourbillon infernal en chute libre ! Je vais prendre un exemple pour expliquer mon propos. Autour de nous, la révolution industrielle a permis un développement énorme, transformant des bourgs en villes ! Mais la désindustrialisation est catastrophique. J’ai deux exemples en tête. Gueugnon est passé de 12000 à 8000 habitants en deux décennies. Pire, Autun est passé de 20000 à 12000 habitants en 30 ans ! L’exode rural est plutôt stoppé depuis une dizaine d’années dans les petits villages autour de ces villes. Certains sont même devenus des dortoirs prisés. Par contre, pour freiner ce mouvement, Autun par exemple, joue contre ces derniers. Ainsi, par exemple, dans le cadre d’intercommunalité, on a financé des agences très onéreuses pour tenter de démarcher des entreprises qui pourraient s’installer sur nos territoires… En théorie, car en fait, elles sont captées par la ville dominante. Par le jeu des PLU entre autres, on se débrouille pour que l’installation dans un village soit rendue impossible !!! Pire, à Etang, village hyper dynamique proche d’Autun, on parle de fermer le lycée forestier pour le transférer à Autun. On retrouve donc toujours cette même logique de concentration tant pour capter les services publics que les emplois, en allant à l’encontre des projets à vraie vocation rurale !

Le grand Public et les journalistes ont focalisé sur les conséquences de la loi NOTRe au seul débat de l’évolutions des grandes régions. Le bilan à ce niveau-là est très décevant. On devait faire des économies d’échelle mais c’est plutôt le contraire, au moins pour le moment. Des élus d’avant et après m’ont expliqué que non seulement leurs émoluments ont augmenté mais que leurs frais pris en charge sont devenus inflationnistes et cela personne n’en parle ! Par exemple, ils pouvaient aller à une réunion ou un événement en un aller-retour dans la journée auparavant. Maintenant, ils doivent très souvent prendre une chambre sur place, donc prendre plus de repas, faire plus de kilomètres pour une même fonction… Mais ce n’est que la partie immergée de l’iceberg, les conséquences de la loi sur les collectivités locales sont encore plus désastreuses. Car la loi conforte l’objectif final qui est de regrouper de gré ou de force, les communes dans des entités plus importantes au profit de quelques politiques et surtout des administrations. En réalité, la décentralisation est un vain mot, un miroir aux alouettes, tout est fait pour que toute décision soit prise directement et indirectement par la haute administration. Notre pays étouffe de cette centralisation extrême. Alors que la COVID a mis en exergue le souhait de beaucoup de citoyens de vivre dans un cadre plus naturel avec un espace de vie minimum comme un jardin, on s’enferme dans un schéma d’aménagement poussant vers les grandes villes polluées, dangereuses, stressantes…

Donc mon pari d’il y a quatre ans est plutôt gagnant dans l’absolu, mais tout est fait pour le rendre perdant car il ne va pas dans le sens des choix nationaux…

A suivre…

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08 novembre 2022

Peut-on de sauver les services publics en ruralité ? (1)

Avant l’annonce de la fermeture du SSR de notre commune, une autre fermeture avait fait grand bruit en 2018. Les parents s’étaient mobilisés pour défendre notre école, une classe de maternelle devant fermer. Le conseil municipal s’était associé au mouvement. Au bout de plusieurs jours de blocage de l’école, l’inspecteur départemental d’académie, sorte de recteur départemental, s’était enfin déplacé… La veille de son arrivée, un des vétos m’avait demandé de « descendre » en tracteur pour appuyer les revendications. Tout un symbole…

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En préambule, il faut que je vous dise qu’en tant que 1 er adjoint à l’époque, je n’allais plus au village sans me changer, sauf si je devais aller en vitesse à la seule coopérative ! Cela me paraissait normal de veiller à ce que ma tenue respecte la fonction et la population. Mais ce matin-là, j’ai rompu avec cette attitude. Dès la fin du « pansage », sans me changer, j’ai pris mon tracteur et je me suis rendu à la manifestation en l’état.

A l’arrivée de ce monsieur, il y a eu quelques instants d’hésitations. Un haut fonctionnaire n’a pas trop envie de devoir s’expliquer en public. Accueillit par le maire comme il se doit, celui-ci me glisse à l’oreille : « Il trouve que les tracteurs, c’est déplacé, mais il est d’accord pour « recevoir » une délégation restreinte, que fait-on ? ». Un truc classique de l’administration pour mettre un filtre avec la population afin de ne pas risquer d’être contredit en public et afin de ne pas rendre de compte à la population. Les membres de la délégation sont alors transformés en porte-paroles de la cause officielle à l’issue de la rencontre et de plus cela permet de créer des frustrations chez les manifestants non participants. J’ai trop vu le jeu dans les manifestations agricoles. Donc d’un commun accord avec le maire, je prends la tête d’un petit cortège en direction d’un préau aménagé, en veillant à ce que tout le monde suive, au grand désappointement de « l’inspecteur -directeur départemental » et de son adjointe qui comprennent qu’ils devront s’exprimer en public !!!

Le maire remercie l’inspecteur de sa présence, exprime avec fermeté sa déception de voir une classe fermer puis donne la parole au public. Rien n’a été préparé. Je sais par expérience que la première intervention est déterminante. Elle donne le « la ». Il n’est pas question que l’on tombe dans des invectives ou autres insultes. Il faut aussi que l’on dépasse les vœux pour aller à des arguments solides. Ces gens-là ne pensent que chiffres et ils ne nous sont pas favorables. Je ne réfléchis pas, je prends la parole en improvisant totalement. J’axe mon intervention sur 2 points très clairs dans ma tête. J’ai en mémoire la réflexion sur les tracteurs et je me suis senti piqué ! Mais il ne faut pas que je le montre. Toute la première partie doit tourner autour de l’abandon de la ruralité par l’administration et la façon unilatérale de décider de la fermeture des services publics sur de simples statistiques. Je repars de la fermeture de la gendarmerie 8 ans plus tôt, la suppression déjà de postes d’enseignants depuis, en déplorant la logique d’une spirale sans fin. J’alterne un ton ferme, une colère feinte puis un ton radouci… Cela me permet d’abattre une première carte. « Vous, vous comptez en nombre d’élèves, moi, en tant que papa dans le passé ou de grand père maintenant, je compte en kilomètres. Vous êtes choqués par les tracteurs, par ma tenue en bottes sans doute ? Les toulonnais n’ont pas l’habitude de me voir dans cette tenue mais je l’ai choisi pour mettre un point essentiel en avant : Ma ferme ne peut pas être installée au centre-ville de Chalon sur Saône et comme bon nombre d’autres personnes de cette salle, nos métiers ne peuvent s’exercer qu’ici ! Vos logiques condamnent nos enfants à faire des tonnes de kilomètres, voir ensuite à être déracinés en internat. Ne venez pas me dire que c’est pour la qualité de l’enseignement. Les instits ici font un boulot formidable, les résultats de beaucoup de toulonnais arrivant en enseignement supérieur en attestent. Vous détruisez un système qui marche au nom d’une logique d’équité qui fait baisser l’ensemble ! On a déjà entendu cela pour la gendarmerie où notre relative tranquillité d’antan a justifié sa fermeture avec comme corolaire une montée de l’insécurité depuis ! » Je sens que j’ai fait mouche. Et j’enfonce le clou avec des arguments d’élu cette fois. « Nous cherchons à redynamiser le bourg en le rendant plus attrayant. Nous commençons d’avoir des résultats tangibles (avant le covid) mais cela prend du temps. L’école, les médecins et la maison médicale, la maison des services, la pharmacie, la poste, les commerces… font partis de l’offre essentielle pour attirer des jeunes couples ! Vous nous coupez l’herbe sous les pieds !!! Nous ne voulons pas être condamnés à vivre dans un désert. Je ne vois pas pourquoi certains politiques urbains bien placés arrivent à différer des fermetures avec des chiffres moins bons que les nôtres ! Tous ici, nous vivons cela comme une injustice républicaine ! »

Ses réponses essayent de justifier la décision de fermeture. Le principal argument est sa contrainte d’optimiser les moyens départementaux avec les exigences budgétaires. Il est clair que ce monsieur doit gérer une enveloppe et qu’il est un peu pris entre le marteau et l’enclume. Comme souvent dans ce genre de débat, les hauts fonctionnaires font état des aides globales accordées aux ruraux, de grands programmes... Je ne suis pas convaincu et je ne supporte plus le mélange des genres et des enveloppes ! Nous sortions à ce moment-là d’un débat sur l’intercommunalité qui a mis en exergue les écarts colossaux entre les dotations de fonctionnement ramenées au citoyen… Le meilleur exemple est le nombre irréaliste de « métropoles » constituées en France, la structure qui rapporte le plus par habitant !!! Chacun est dans son rôle…

D’autres parents interviennent ensuite avec des témoignages qui confortent le sentiment d’abandon… Mais je retiens surtout l’intervention poignante d’une voisine. Elle est née à Lyon, s’est mariée avec un toulonnais. Ils ont vécu à Lyon jusqu’à ce qu’ils aient des enfants. Elle explique qu’ils ont fait alors le choix de revenir en Saône et Loire, « pour élever leurs enfants dans un cadre de vie équilibré ! » Elle souligne la qualité de vie et l’importance pour eux d’être près de la nature, loin du stress de la ville et de son insécurité grandissante. Mais pour eux, une des conditions reste que les écoles à proximité soient de qualité.  Elle parle avec son cœur ce qui fait réagir l’inspecteur… En effet, elle s’est présentée et exerce la profession d’avocate. Il fait une réflexion qui suggèrerait qu’elle ne jouerait pas dans la même cour que les autres parents. Cette intervention va dans le droit fil de ce que nous voulions mettre en avant : La ruralité a un avenir et est une vraie alternative aux limites de la concentration urbaine !

Après cette intervention, je perçois une certaine déstabilisation chez notre interlocuteur. Il nous pose des questions : « Combien d’enfants pouvez-vous me garantir dans les prochaines années ? » Avec d’autres, je lui réponds que nous ne pouvons pas donner de chiffres, nous ne sommes pas dans l’intimité des couples. « C’est un pari sur l’avenir » ! Il finit par céder un peu de terrain en annonçant le maintien d’un demi-poste pour la prochaine année scolaire et la promesse de réouverture un jour si… « On sait quand on ferme une classe, on ne connait pas les conditions nécessaires pour en ouvrir une nouvelle ! C’est un marché de dupes. » conclura le maire…

Mais que peut-on obtenir de plus ?

A suivre…

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01 novembre 2022

En Attendant…

J’ai écrit plusieurs billets de suite mais j’attends un peu pour les publier. J’ai été rattrapé par l’actualité du village !

HOPITAL 1

Le SSR ferme, sur la volonté de L’ARS ! Il est transféré à Chagny, à 62 kms par la route la plus directe mais pas la plus facile puisqu’il faut plus d’une heure pour rejoindre cette ville… L’annonce s’est faite en deux temps !

HOPITAL 2

Pour ne pas afficher cet abandon en rase campagne, nos technocrates tentent de faire croire en une mutation heureuse et bénéfique pour notre population ! Elle est présentée comme une réponse affirmative à une demande d’une commission locale télécommandée… Bref, on fait croire que l’on a tenu compte des avis locaux. La bonne vieille technique de chantage : « Vous acceptez ça, sinon vous n’aurez plus rien ! »

Mais ne nous y trompons pas, nous perdons la possibilité de pouvoir bénéficier d’un centre de rééducation fonctionnel à moins de trois quarts d’heure de route pour le plus proche, qui est souvent complet et se situe dans une zone médicale administrative différente !!! A nouveau, le désert avance… Imaginez que j’ai besoin de ce type de soins ! Mme PH passera plus de temps en voiture pour venir me rendre visite que de temps avec moi ! Je ne parle même pas de bilan carbone… Mais nos hauts fonctionnaires s’en moquent éperdument, ils ont planté le système par des choix aberrants depuis des décennies et masquent leur échec en persévérant dans la destruction plutôt que de d’assumer leur responsabilité collective ! C’est consternant…  

Le pire est pour notre village puisqu’on va perdre des postes de personnel soignant ! C’est donc un appauvrissement alors que…  Vous comprendrez en lisant les futurs billets. Mais j’avoue que je ne sais plus comment positiver l’action politique ? J’essayerai de faire des propositions au troisième à venir, mais pour le moment, j’avoue que je suis plutôt pessimiste, il me faut le temps de digérer …

Une chose est certaine, notre état est ultra centralisé et ce sont les grands technocrates qui ont le vrai pouvoir, ce qui pose question sur l’état réel de notre démocratie !

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22 octobre 2022

Tiens, tiens...

Puis je vous rappeller ceci, écrit le 10 octobre : "Et ce matin, alors que je me lève après Mme PH, celle-ci m’annonce qu’il n’y aurait que 30 % des stations à sec en France d’après le gouvernement ! Je ne peux m’empêcher de lui répondre : « Oui, selon nos hauts fonctionnaires qui ont les chiffres de vendredi soir et qui étaient tranquillement en week-end !"

Et quelle surprise (ironique) de lire ceci sur le JSL, notre journal local, hier soir !

sous estimé

"21h46 : La gravité de la pénurie sous-estimée par le gouvernement ?

Les informations diffusées par le gouvernement sur les pénuries de carburants dans les stations-service pendant la grève des raffineries étaient sans doute sous-estimées, selon les données publiquement disponibles et analysées par l'AFP, franceinfo et Le Figaro.

L'un des pires jours de la pénurie, le 17 octobre, le gouvernement déclarait que 28,1% des stations-service de France étaient en manque soit d'essence, soit de diesel, soit des deux. Mais la proportion réelle était ce jour-là de l'ordre de 40,6% selon une estimation de l'AFP à partir des données du site prix-carburants.gouv.fr portant sur environ 9 800 stations, et de 40,8%, selon une autre estimation du Figaro. Franceinfo conclut de son côté que 50% des stations étaient en difficulté ce jour-là.

Au pic de la grève, 49% des stations des Hauts-de-France et 47% de celles d'Ile-de-France étaient de facto fermées les 11 et 10 octobre, respectivement, selon l'AFP, c'est-à-dire qu'elles ont déclaré vendre ni essence, ni diesel. Ces jours-là, le gouvernement affirmait qu'environ 44% des stations dans ces deux régions étaient en rupture totale ou partielle. Pire: en Haute-Garonne, ce sont 72% des stations qui connaissaient des ruptures de carburants le 11 octobre, selon l'AFP.

Au pic de la grève donc, un peu moins de la moitié des stations de France ont manqué de carburant, dont un tiers étaient complètement à sec, selon plusieurs estimations de médias."

Se pose donc la question de la manipulation de l'information pour gouverner. Mais avant cela, quelle est l'information réelle collectée et rapportée ? Je n'ai eu aucun mérite en écrivant, c'était l'observation qui nous a permis avec Mme PH d'avoir cette vue globale de la situation. En voyant le comportement des gens, paniqués aux stations, on pouvait en déduire ce qui allait se passer. Quelle est la capacité d'un dirigeant à anticiper une situation s'il n'a que les chiffres du thermomètre, après coup, sans que les autres symptômes précurseurs lui soit transmis ou qu'il accepte d'y porter attention ? Comment gouverner quand on ne s'appuie que sur une cohorte de hauts fonctionnaires, aux ordres, sortant tous du même moule ? Quel est le rôle et l'influence réelle également, des chroniqueurs dont les analyses ne sortent, bien souvent pas, de cette "façon de penser unique" ?

 

Comment un dirigeant peut-il garder le contact avec la réalité d'un pays ? Garder un cercle d'amis proches, indépendants des idées politiques, qui puissent avoir la liberté de lui parler sans garde-fou ? Garder une vie "normale", au moins les WE, est ce même possible avec les problèmes de sécurité ? Comment le comportement de certains qui, incapables de faire la différence entre le chef d'état et l'homme venu comme simple spectateur, transforment un spectacle en manifestation ? Certains comportements ne le poussent ils pas à s'enfermer un peu plus dans son palais ? Certains ont reproché à la première ministre finlandaise son lâcher prise au cours d'une soirée entre amis... N'est-ce pas au contraire le signe d'une femme indépendante, capable de rester simple et de s'amuser, donc de n'être pas déconnectée ?

Il y a là un vrai problème et beaucoup de questions qui expliquent le désintérêt pour la politique, trop loin des réalités quotidiennes !

 

 

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19 octobre 2022

Le vrai premier jour de ma retraite !

Nous sommes le 6 juillet. Mme PH est en retraite depuis 6 jours ! Elle a choisi sa date d’arrêt en fonction du périple que nous allons entamer. Voilà des semaines que nous préparons cette expédition qui ne peut se faire qu’en été. Nous retardons même d’un jour le départ pour être certain de ne rien oublier, faisant et refaisant la check liste de tout ce à quoi nous devons penser !

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Direction le cap nord en camping-car. Cela va marquer la vraie rupture avec la vie d’avant. Le paysan attaché à sa terre qu’il n’a pas abandonné depuis 40 ans plus de 15 jours est propulsé dans un raid au long court prévu sur deux mois. 8 ou 9 semaines où nous devons vivre dans 10 m2, partager les mêmes plaisirs et les mêmes contraintes.

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La santé d’un très proche nous obligera à interrompre plus tôt que prévu ce voyage mais qu’importe car les 5 semaines déjà vécues ont été merveilleuses. Un vrai lâcher prise ! Dès le premier jour nous ne sommes plus dans la contrainte du temps qu’impose le travail ou de vacances limitées. Notre seule limite est d’être de retour pour le début septembre, même pas pour un jour particulier !!!!

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Pour moi, c’est une découverte que je savoure, heure par heure. Nous ne devons pas arriver à un endroit précis chaque soir, ni nous arrêter à une heure définie à l’avance. C’est selon ! C’est sans doute la première fois que je vis un truc pareil ! Même la météo qui a eu tant d’influence sur ma vie ne compte plus ou presque.

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J’ai toujours rêvé de faire la route 66 aux USA, de me laisser impressionner par les très grands espaces… Je vais le vivre en traversant la Suède par son centre. Nous nous amuserons lorsque le GPS nous indiquera que le prochain rond-point est à 140 kms. Nous nous enivrerons de ces étendues infinies de forêts et de lacs ! Puis nous serons éblouis par les lumières extraordinaires et la profondeur incroyable des fjords du grand nord norvégien ! Toutes les dimensions habituelles de notre horizon en France se perdant dans cette immensité dont on ne voit pas les limites… Chaque kilomètre était une immersion dans une nature préservée, où on admirait des montagnes plongeant dans la mer sans jamais se lasser. Imaginez la vallée de Chamonix remplie d’eau, cela se répétant sur des milliers de kilomètres, sans jamais qu’il y ait répétition paysagère !

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Mais cerise sur le gâteau, au-dessus du cercle polaire à cette saison, c’est le jour permanent qui déroute le plus. Le rythme biologique est bouleversé. Conduire à minuit avec des lunettes de soleil est une expérience unique ! Se poser, seuls sur un spot vers 20 h pour dîner et dormir, et se réveiller le lendemain pour découvrir des voisins arrivés pendant la nuit, se répétait chaque jour, chacun pouvant choisir sa façon de voyager et son propre rythme. On a même croisé des français qui ne circulaient que de « nuit » soit 20 h à 5 h !!!

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De plus, alors que nos enfants nous rapportaient des températures caniculaires, nous vivions entre 5 et 20 °C ! La météo au-dessus du cercle polaire, c’est un temps Breton XXL !!! Cela nous allait très très bien. Les lumières étaient à l’avenant d’un temps variant en permanence. Les prévisions changeaient d'heures en heures, aussi avons-nous abandonné le projet de prévoir telle ou telle activité nécessitant une météo favorable pour nous adapter à ce qui se présentait sur place, cela sans aucune frustration ! Tout au plus avons-nous fait un arrêt d’une journée dans un camping pour laisser passer une tempête, profitant des installations pour faire des lessives et prendre une bonne douche… Ayant perdu mes repères en prévisions météorologiques, j’observais les travaux agricoles locaux pour essayer d’anticiper. Quand les paysans norvégiens fauchaient, je savais que cela annonçait 2 jours sans grosse pluie : Paysan un jour, paysan toujours !

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Je pense revenir plusieurs fois sur ce trip dans différents billets. Mais depuis notre retour, il est certain que je n’ai plus la même perception de ma nouvelle vie ! Pour moi, être vraiment en retraite, c’est garder une foule de projets tout en sachant savourer l’instant présent sans pression ! Une liberté qui m’était inconnue jusque-là.

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14 octobre 2022

Retraite, et si je commençais par les autres événements familiaux…

 

Quand on est parent, on se demande toujours si l’éducation donnée est la bonne. Qu’a-t-on réussi et qu’a-t-on manqué ? Je ne reviens pas sur l’adolescence des enfants, un moment où tout semble nous échapper… Mais ensuite, il faut être patient, attendre que chacun trouve sa voie. Et un jour peut-être se dire que… 

Un paysan ne rêve que d’une chose : Voir un de ses enfants prendre sa suite. Pour moi, cela n’a pas marché ! Enfin, pas de façon formelle. Mais des petits signes m’ont surpris quand mes deux derniers enfants à la fin de leurs études supérieures se sont renseignés pour passer un diplôme agricole à minima afin de pouvoir éventuellement exercer en sus de leur métier. Cela s’est arrêté là, mais traduisait un intérêt certain pour la ferme. Ils m’ont ensuite posé beaucoup de questions au moment de ma succession, voulant s’assurer que la terre restait bien dans la famille !

Leur début de carrière les a orientés vers Paris dans un premier temps, Lyon ensuite pour ma cadette. A l’époque, ce n’est pas si vieux, on ne pouvait pas imaginer avoir un métier de cadre ou de consultant ailleurs que dans ces très grandes villes.

Puis est arrivé le COVID !

Leurs employeurs ou d’eux même, ils ont immédiatement basculé en télétravail, tout comme le conjoint de mon ainée. Sur les 6 membres de cette génération, 5 se sont mis à télétravailler. 1 dans une belle maison de banlieue lyonnaise, 4 ou plutôt 2*2 dans des appartements de 50 m2, mon aînée étant la seule en profession libérale où la présence physique est obligatoire. Le discours de nos deux jeunes couples citadins a très vite changé. Autant, ils envisageaient de se rapprocher dans un futur indéfini mais en restant proches de zones urbanisées denses dans un premier temps, autant tout s’est accéléré à la sortie du COVID même si un projet chez ma cadette avait déjà été amorcé juste avant. La lyonnaise s’est donc retrouvée à Lugny, dans le vignoble près de Mâcon et mon fils m’a fait déménager en express dès le déconfinement pour s’installer provisoirement au Creusot ! Le temps d’acquérir et de retaper une grange à 1 km à vol d’oiseau de ma ferme !!!! Qui l’eut cru en 2019 ????

Aujourd’hui, le conjoint de mon aînée se rend une fois par semaine à Lyon pour son travail. Ma cadette y va aussi une fois par semaine. Son conjoint est à 100 % en télétravail et a bien renâclé quand il a dû aller à Paris une fois cette année. Mon fils va une journée par semaine à Paris et se déplace de temps en temps à l’étranger. Quant à ma future belle-fille, elle a abandonné la fonction publique qui refusait de la mettre en télétravail intégral (le poids des directives administratives) pour rejoindre une boite où elle peut le faire. En 3 ans, les conditions de travail ont totalement changé. Un enjeu crucial pour l’avenir de la ruralité ! Dire que j’avais un jour dit, il y a 15 ans, à un conseiller général, devenu député depuis, que l’accès au numérique donc la qualité des connexions Internet serait déterminant pour la survie de nos campagnes. Que de retard pris, avec encore un déploiement de la fibre qui traîne en longueur… Mais je ne pensais pas que cela serait aussi violent avec cette accélération COVID…

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Pour en revenir à la question de l’éducation de nos enfants, je peux maintenant en tirer quelques conclusions. La réussir, ce n’est pas les voir vivre comme nous ! Mais c’est constater qu’ils partagent des valeurs et principes qui nous paraissent essentiels en s’adaptant aux évolutions inéluctables !

La première est que nous, ma femme et moi, leur avons inculqué que le travail est fondamental ! En clair ce sont des bosseurs même si ce n’est pas à la mode dans certains milieux « bobo » qui prônent la paresse. On ne peut pas se reposer indéfiniment sur le travail des autres, que ce soit par la rente ou par procuration avec les redistributions de l’état, cela reviendrait à une forme moderne d’esclavage ! Un paysan comprendra de quoi je parle, quand on voit les évolutions des prix agricoles donc du coût de l’alimentation par rapport au reste des dépenses d’un ménage ! Il faudra bien un jour remettre à plat la vitesse à laquelle se sont constituées des fortunes dans la grande distribution par rapport à l’évolution du monde agricole ou la disparition d’une partie du tissu industriel ! Donc, je pense qu’on ne peut profiter durablement que de l’argent que l’on gagne en travaillant honnêtement !

La seconde est qu’ils sont viscéralement attachés à une vie la plus proche possible de la nature. Ce retour à la campagne, après avoir goûté à la société consumériste artificielle des grandes villes, s’accompagne d’un besoin de nature. Ils refont des jardins potagers, des vergers, ont des poules ! Alors qu’ils auraient les moyens de tout s’acheter, ils ont besoin de produire des choses simples et de les partager ! On revient aux temps des visites chez mes grands-parents où on arrivait avec du beurre et des fromages fait par ma mère et où on repartait avec d’autres fromages ou des fruits selon les productions et réussites de chacun au gré des saisons. Et je ne suis pas en reste dans cette démarche avec les produits de mon jardin lorsque c’est abondant…

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Je n’aurais jamais pensé que nos enfants portent ainsi, à leur façon, des valeurs qui sont des valeurs paysannes. Je constate qu’ils aiment les bons aliments, simples, avec une envie de bien cuisiner. Et c’est aussi un plaisir que j’ai trouvé ! Je fais mon pain ! Nous cuisinons avec Mme PH les légumes du jardin, nous congelons lorsque la nature est féconde. Nous aurons bientôt des poules… En fait, même si cela reste partiel dans notre consommation, nous produisons pour retrouver un peu d’autonomie et surtout nous régaler. Il reste un peu de « chasseur-cueilleur » enfouie en chacun d’entre-nous, une quête que n’apportent pas les courses en hyper mais que retrouvent ceux qui travaillent avec la Nature… Ne parlez pas à Mme PH de salade de tomates achetées tant celles du jardin sont incomparables et qu’il est impossible d’acheter l’équivalent en grande surface. On arrive même avec nos produits à épater nos amis avec quelques plats « maison » ! Finalement, le bonheur ne serait-il pas de savoir apprécier ces plaisirs simples, de savoir se contenter de ce que l’on gagne et de ce que la nature nous offre ? Or, notre société de consommation et la publicité font de nous des frustrés permanents, des envieux ou des jaloux… Je suis heureux de voir que mes enfants s’en détachent un peu, au moins par certains aspects, en privilégiant la qualité de vie, le recyclage pour ne pas gaspiller… !

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Le troisième point qui a une incidence sur ma vie de retraité concerne leurs projets d’habitation. En fait, je me projette dans les leurs et cela me stimule beaucoup. Je les aide autant que possible surtout mon fils, question de proximité géographique. J’ai plaisir à effectuer de travaux pour leur projet. Cela me donne des objectifs et je retrouve l’adrénaline pour réussir un chantier dans un temps imparti. Cela se traduit par exemple par l’organisation d’un chantier de démolition de bétons de sol en un week-end pour respecter le délai de location du brise roche. Quitte à faire une tonne d’heures pour ne s’arrêter que lorsque c’est terminé. Ou de reprendre toutes les alimentations en faisant des tranchées pour passer gaines et tuyaux pour les raccordements. Ou encore de démonter des cloisons vitrées chez ma cadette. A chaque fois, ces petits défis relevés me redonnent un sentiment d’utilité et de mettre une certaine expérience, surtout d’organisation de chantier, à leur service. 

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Si la COVID a gâché mon début de retraite, les changements de société qu’il entraine ont de bons côtés. Les ruraux ne sont pas forcément convaincus des bienfaits de ce changement, j’y reviendrai. C’est vrai que cela provoque aussi des problèmes. Notre région est idéalement placée, au cœur de l’Europe. La fibre se déploie, la RCEA se terminera dans 3 ou 4 ans, la gare de TGV est à 25 minutes de mon village. Nous avons un paysage unique, c’est ce que m’ont dit tous les visiteurs étrangers à Charolles ou même nombre de touristes ! Nous avons des kilomètres de chemins à découvrir à pied, à vélo, à cheval… Nous avons une rivière que l’on peut pratiquer en canoé en dehors des périodes de sécheresse, des lacs pour la pêche… Bref, nous avons plein d’atouts à condition de ne pas être abandonné par les pouvoirs publics. Car certaines administrations, devant ce mouvement de désurbanisation, veulent le saboter, condamnant ce retour à une proximité avec la nature au nom de je ne sais quelle idéologie. N’a-t-on pas eu une ministre du logement qui a dit que « les appartements avaient moins d’incidence sur le réchauffement climatique que des habitats individuels » ! Ce qui reste vraiment à prouver si on fait une analyse globale d’un style de vie et non une approche sectorisée. Elle a blessé profondément les ruraux qui se sont sentis accusés d'être de mauvais élèves. Les « cages à lapins ou clapiers» comme disait mon père en parlant des « HLM » à l’époque peuvent rapidement redevenir à la mode pour conforter les très grandes villes, le bonheur des habitants étant relégué au second plan ! Pourtant, il suffit de lire les sondages d’envie de fuir des parisiens pour se rendre compte que ce n’est pas la piste d’avenir, du moins pour nombre de citoyens !!!! Ou plus simplement d'observer la carte des bouchons dès qu'ils veulent s'échapper de leur "paradis" !

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12 octobre 2022

Le vrai début de ma retraite…

 

Pour la MSA, ma retraite a commencé le 1 er octobre 2019. Effectivement pour moi cela a été à la mi-février 2020 avec le départ de mes deux derniers bovins, même si dès la fin octobre 2019, je n’avais presque plus d’animaux et que j’avais libéré 98 % des surfaces ! A ce propos, mes successeurs ont emblavé début octobre et ont amené des vaches en sus de celles des miennes qu’ils gardaient dès la mi-octobre. On ne peut pas transférer une ferme à une date précise mais sur plusieurs semaines.

Le lendemain du départ des 2 dernières vaches, nous partions quelques jours dans le midi. Je pensais que ce serait le vrai départ de ma nouvelle vie. Mme PH avait pris quelques jours. Mais elle était déjà plus que préoccupée par cette nouvelle maladie chinoise appellée COVID. Tout notre séjour en a été perturbé, en faisant les pharmacies et les magasins de bricolage à la recherche de masques ! Elle voulait être clean à sa reprise. De plus, elle guettait toutes les informations possibles sur la maladie, cherchant à comprendre quel protocole il lui faudrait mettre en place à son retour pour ne pas mettre en danger ses patients ! Disons-le, ces quelques jours furent un moment de détente certes, mais très loin d’un moment d’insouciance et encore plus loin d’une retraite paisible.

Le couperet du confinement tomba quelques jours après notre retour. Je repris mes responsabilités communales pour mettre en place avec l’équipe, tout ce qu’il était possible de faire pour aider la population. Mais en m’appliquant des mesures de précaution très très rigoureuses pour ne pas risquer d’être vecteur pour mon épouse donc pour ses patients. Je me retrouvais ainsi à la fois isolé sur mon lieu de vie et en contact permanent avec mon village. J’ai pu apprécier alors le sérieux de certains agents municipaux mais pas de tous, certains en ont bien profité… Je ne reviens pas sur l’extraordinaire solidarité qui a animé notre village pendant cette période, bien vite cassée, à la fin des restrictions. Pour m’occuper, je faisais des clôtures sur la ferme pour mettre à jour quelques endroits fragiles.

De cette période, je garde un souvenir compliqué. Une gestion de restrictions pondues par des technocrates parisiens incapables de discernement ! Traduites par exemple sur le terrain par un sous-préfet capable de faire verbaliser des pique-niqueurs sur une plage quasi déserte pour une bouteille de rosé !!! Notre préfet de région de l’époque n’a pas fait mieux en pondant des arrêtés tout aussi farfelus ! Visiblement, ils n’avaient pas compris que le virus se propage quand on se concentre et qu’en plein air, en respectant quelques mètres, il n’y avait aucun risque ! Les contrôles étaient intelligents quand les gendarmes étaient seuls, mais ressemblaient à ceux d’une autre époque ou d’autres pays peu fréquentables, dès qu’un chef ou un sous-préfet sortait sur le terrain. Ainsi un samedi après midi, le carrefour du village était une vraie souricière. On empêchait les gens de se promener en forêt, tout en provoquant des files d’attente à l’entrée des magasins pour soi-disant gérer le flux interne. Bref, comme tout à chacun, j’ai constaté qu’on a privilégié l’infantilisation, avec le rejet que cela provoque, à la responsabilisation des individus avec une information claire. Partant de là, il fallait faire preuve de responsabilité humaine au village…

Voilà comment j’ai vécu les 4 premiers mois de ma retraite. Obligé de partir avec deux papiers à jour, une attestation d’emploi de ma femme (bénévole) et un laisser passer, pour aller aider au secrétariat de mon épouse de temps en temps ! Car il fallait du temps pour expliquer à des personnes souvent âgées tous les protocoles sanitaires. Nous avons été privé de nos enfants et petits-enfants pendant cette même période, un comble pour un début de retraite où je comptais pouvoir profiter enfin d’eux…

Nous avions projeté des sorties puisque je pouvais enfin être disponible. En activité, je ne quittais plus la ferme de nuit de décembre à mi-avril à cause des vélages. Ensuite, il fallait jongler avec les foins, les moissons, les semis ce qui était incompatible avec la planification indispensable de l’activité de Mme PH qui se faisait des mois à l’avance. Car mes travaux étaient totalement dépendants de la météo. Donc au mieux, sait-on une semaine à l’avance quand il m’aurait fallu prévoir au moins 6 mois plus tôt… Ma retraite devait marquer le début d’une certaine liberté, peine perdue !

La COVID a tout bouleversé. Pas question de rendre visite à mes connaissances. Il a fallu attendre 2 mois pour pouvoir aller chercher le camping-car qui était arrivé. Ensuite, nous n’avons pu partir que quelques jours assez peu de fois. Les soubresauts épidémiques nous rendaient très prudents. Libéré de mes engagements communaux, mais dans l’incapacité d’accomplir mes projets, j’avoue avoir eu beaucoup de mal à vivre cette période. Le contact avec mes animaux me manquait, l’adrénaline des travaux également… Pour autant je ne voulais pas m’immiscer dans le travail de mes successeurs et la simple conduite d’un tracteur ne m’intéresse pas quand elle est déconnectée des décisions des travaux. Ce n’est pas conduire qui me faisait faire des heures jusqu’à plus soif, mais la volonté de réussir un chantier dans les temps et parfois contre le temps !

Ce début de retraite était très loin de la période idyllique que certains espèrent. J’étais trop impliqué et passionné par mon métier pour le quitter d’un coup. Je ne trouvais même plus plaisir à écrire, ne me sentant plus légitime à parler d’agriculture puisque je ne pratiquais plus. De plus, certains discours sur une supposée fracture entre retraités et jeunes me blessaient. J’ai cotisé plus de 43 ans en bossant comme un fou, sans compter mes heures, pour m’entendre dire que mes 900 €/mois étaient indus, voir volés aux jeunes générations !!! Etais-je devenu un boulet pour la société ? J’y reviendrai…

Bref, j’ai l’impression d’avoir vécu en pointillé pendant deux ans, avec une vie dictée par les vagues COVID ! Jusqu’à ce que Mme PH prenne sa retraite et quelques autres événements familiaux. C’est alors que commence vraiment ma retraite, du moins celle que je j'espérai !

A suivre donc…

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10 octobre 2022

Pénuries...

Il y a 15 jours, mon successeur m’annonce qu’ils ont eu du mal à se faire livrer du GNR. Sur le moment, je n’y attache pas trop d’importance. Puis, il y a 10 j, je constate que ma cuve est vide. Je fais des travaux pour mon fils, je rentre mon bois et je dois terminer une tranchée pour amener l’eau de la ville dans ma maison avant les gelées… Je téléphone donc pour m’entendre dire qu’aucune livraison ne sera possible dans la semaine et de rappeler en fin de celle-ci. Cette fois, on me propose un maximum de 500 l de livraison à 1,67€ au lieu des 1.30 € de la dernière livraison de mon successeur. En interrogeant la personne, j’apprends qu’ils ont dû aller chercher par leurs propres moyens le GNR à Fos (500 kms), qu’ils sont obligés de rationner les clients par livraison de 500 l. Cela expliquerait la hausse du prix ! Considérant que je ne suis pas prioritaire, je renonce à la commande pour laisser la place aux agriculteurs pour lesquels les travaux de semis sont nettement plus importants à mes yeux que les tranchées !

Si je fais état de cette première alerte, c’est pour souligner que l’état privilégie les particuliers aux entreprises dans sa gestion de la crise énergétique malgré les discours. On livre les stations-services avant les grossistes qui fournissent les entreprises. On a plus peur des gilets jaunes que de mettre l’économie par terre ! Drôles de priorités… Imaginez que les agriculteurs ne puissent pas semer, c’est la récolte de l’année prochaine qui est en jeu. Comme la récolte des betteraves pourrait être compromise et ainsi de suite. Pourtant, aucune pénurie en Belgique, en Allemagne ou au Luxembourg, donc on ne peut pas évoquer la guerre en Ukraine… Je n’ose pas penser à ce qui va se passer dans le secteur des transports, donc de la logistique en général si c’est pareil. On irait vers un effondrement de l’économie avec des pénuries dans tous les domaines, y compris alimentaires. Aucune leçon n’a été tirée de l’épisode COVID !

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Hier, nous sommes allés voir notre fille et nos petits-enfants près de Lyon. Insouciants et certains de trouver, nous avons décidé de partir avec un réservoir plein à un quart, histoire de ne pas contribuer à la peur panique du « plein de précaution ». Mal nous en a pris ! Sur autoroute infos à midi, on apprend que certaines stations sont à cours, même si nous avions vu des tarifs à plus de 2.20 € le litre sur une aire de Chalon (aucun opportunisme ?). Arrivés sur place vers 13 h, nous nous disons qu’il serait prudent de faire le plein. Naïvement, devant une queue qui nous aurait fait arriver bien tard pour le repas des enfants, nous décidons de reporter au soir ce plein. Résultat, stress maximum le moment venu, avec cette première station vide. Nous décidons de rentrer par les petites routes, pensant avoir plus de chance dans les villages. On va de stations en stations vides. Il faudra attendre la septième station, avec une aiguille proche de la réserve, la plus chère de la région à Charolles, pour faire le plein !!!! Du coup, on subit un prix de 45 cts supérieur aux 1,50 € promis par le ministre de l’économie, 30% de plus !  Ensuite, sur le trajet, à nouveau des quilles sur les lieux de distribution. Mon fils nous écrira qu’ils ont vécu la même chose de Montbrison au Creusot où tout était fermé…

Lorsque je jette un coup d’œil sur tweeter à 21h, mon sang ne fait qu’un tour ! Notre première ministre, en déplacement à Alger, « suit la situation de près ! ». Précédemment, le président avait indiqué qu’il convenait de « ne pas paniquer… ». Mieux, le porte-parole du gouvernement avait annoncé vendredi qu’il n’y avait pas de pénuries. Et ce matin, alors que je me lève après Mme PH, celle-ci m’annonce qu’il n’y aurait que 30 % des stations à sec en France d’après le gouvernement ! Je ne peux m’empêcher de lui répondre : « Oui, selon nos hauts fonctionnaires qui ont les chiffres de vendredi soir et qui étaient tranquillement en week-end ! J’attends de connaitre les vrais chiffres du temps réel !!! Moi, en extrapolant ce qu’on a vécu, je parie sur 50 à 60 % au moins ! Mais comme pour les masques, ils n’avoueront pas ! Et il leur suffira de compter les deux heures d’approvisionnement possible dans la journée, suite à une livraison, comme station ouverte pour justifier du chiffre… »

Nous voici revenus en février 2020 ! Rien ne pouvait nous arriver avec le COVID. On avait le meilleur système de santé du monde, des masques et de toute façon, le virus ne concernerait que les pays en voie de développement en retard d’un point de vue sanitaire. On a vu le résultat, mais on recommence. On évoque souvent le monde parallèle dans lequel vivrait Mr Poutine. Mais nos dirigeants ne sont-ils pas dans le même cas ? Quel est leur rapport à la vie réelle ? Quels résumés leur sont faits de la situation réelle ? On voit bien que cela leur échappe totalement. A force de ne rencontrer que des sympathisants, de taxer d’opposant tout discours qui n’encense pas leur action, de s’entourer d’une cour qui n’apporte aucune contradiction, on arrive à cette situation hors-sol. Cela n’aurait pas d’importance si cela ne faisait pas le lit des extrêmes. Allez expliquer à tous ceux qui ont passé deux ou trois heures hier pour trouver du carburant pour aller travailler cette semaine que tout est bien géré et sous contrôle ! Allez leur expliquer qu’il faut en priorité de grandes réformes comme celle des retraites, alors que l’hiver arrive et que les prix flambent dans tous les sens…

Personne en haut lieu ne lira ce genre de billet ! Je ne suis qu’un petit « plouc » comme on me l’a dit plusieurs fois dans ma carrière et mes responsabilités, quand mon propos dérangeait. J’ai comme règle de ne critiquer que lorsque j’ai des contre-propositions. J’essaye de combattre les idées simplistes et populistes autour de moi. Mais cette fois, je suis à court d’arguments. En écoutant, je sens l’exaspération monter inexorablement et se tourner vers les extrêmes, surtout à droite.  J’aurais envie de dire à nos dirigeants qu’ils devraient changer de discours, sortir de leur palais et s’affranchir des calculs politiques pour agir vraiment sur le quotidien des gens. Mais ce vœu ne trouvera pas d’écho ! On classe des gens comme moi comme « opposants », ignares car sans grands diplômes d’état alors que nous sommes des millions, qui raisonnons avec ce que l’on nomme le « bon sens » ! Ce qui ajouté à une dose de principes, est un fondement d’une gestion démocratique !

Oui, hier soir j’étais inquiet pour deux raisons. Un, nous arrivons dans une zone de pré-insurrection car nous ne savons plus comment dire aux chefs de la nation qu’il faut changer de logiciel, que le fonctionnement de l’état ne peut pas continuer ainsi, que le mensonge ne peut masquer durablement des erreurs de gestion… Nous sommes pris en otage par la CGT et le patronat sans réaction politique. Il y a un vrai risque que cela parte dans tous les sens.  Deux, dans le contexte actuel de guerre en Europe, certains ont beau jeu de relayer le discours russe en transformant notre soutien à l’Ukraine en bouc-émissaire de nos propres maux. Alors qu’on devrait serrer les rangs, nos difficultés deviennent une sorte de prime aux extrêmes et à ceux qui sont prêts à sacrifier notre liberté et celle des Ukrainiens à une hypothétique « paix », modèle 1938. La chienlit née de la gestion interne apparaitrait comme une victoire pour Mr Poutine. Dans les deux cas, cela favorise l’extrême droite. La menace de dissolution est donc contre-productive. C’est une maladresse politique dans une situation aussi incertaine sur le plan national et international ! On attend de nos chefs un cap clair,  non des menaces et certainement pas des revanches personnelles à prendre sur l’électorat…

D’où mon tweet réactif hier soir :

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La parole présidentielle a perdu beaucoup de crédit en 20 ans, ne serait-elle pas carrément devenue inaudible ?

 

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