western des temps modernes, vu de la prefecture!
Dans le rôle des indiens, les habitants de mon village, et dans celui des cow boys, devinez ?
« Dégagez ! Je vous dis de dégager...
Mais je veux juste me glisser sur la place droite ? je ne veux pas vous gêner !
Vous n'êtes pas prioritaires, alors dégagez ! »
L'homme qui vient de me parler ainsi est juché sur sa moto blanche, il a des petites boules bleues qui clignotent : deux à l'avant et deux à l'arrière. Il est vraiment très très énervé, il gesticule dans tous les sens, il a un sifflet autour du cou ... Il est 17 h 30 et déjà la nuit est tombée sur la campagne et sur le village. C'est à cette heure que les transports scolaires déversent les collégiens qui rentrent de leur journée, l'établissement est à 15 km. En temps normal, la place est trop petite pour accueillir à la fois les clients des petits magasins qui la bordent et les parents de la campagne environnante qui viennent chercher leur progéniture. Le car est obligé de se stationner en double file pour que chacun puisse descendre. Bien que nous soyons au coeur d'un village de 1600 âmes, l'encombrement à cette heure-ci est digne des bouchons de grandes villes ! Par contre, il ne dure que quelques minutes !
Mes mots de mécontentement se perdent heureusement dans le bruit des moteurs. Je suis obligé de prendre une direction différente de celle de mon plan de route initial. Je n'ai pas osé persévérer dans ma contestation, comprenant que quoi qu'il advienne, l'uniforme conférait à mon interlocuteur une supériorité qui dans le pire des cas me conduirait à une amende. Il n'empêche !
Derrière une voiture jaune , armée d'une panoplie de clignotants oranges, jaillit un mastodonte qui occupe toute la chaussée. Mais ce n’est là finalement que le dixième de la journée !
Un quart d'heure plus tard, quand nos compères de la force publique ont enfin réussi à extraire ce convoi dit exceptionnel de ce goulot d'étranglement que constitue notre village, la vie normale reprend son cours ! Nous voici enfin entre nous, campagnards, avec nos règles de débrouillardise afin de récupérer nos enfants en un minimum de temps quitte à adapter les règles de stationnement à l’exiguïté des lieux ! Les devoirs attendent à la maison !
Le maire de la commune sort à ce moment de la mairie.
« Bonjour P., je croyais que la déviation nous infligeant cette multitude de convois devait être levé le 10 novembre ?
Et bien, PH, tiens-toi bien, c'est le cas. Mais la préfecture qui délivre les autorisations pour les convois exceptionnels l'a fait pour des boîtes étrangères en les traitant par lots de 100 ou 200 passages, et ils ne peuvent plus joindre les personnes concernées. Nous sommes avertis d'un passage de trois pales d'éoliennes demain dans la journée, nous n'avons pas d'horaire de passage et nous sommes obligés sur ordre de la préfecture d'interdire le stationnement dans les deux rues et sur la place car pour tourner, les engins de 38 m de long ont un déport arrière qui balaye toute la place ! Tout le monde en un ras-le-bol, d'autant plus que l'autre jour, ils sont arrivés sans prévenir. Il a fallu que les riverains sortent pour retirer les voitures. Les motards n'avaient pas trouvé mieux pour avertir les gens que de mettre les sirènes de leur moto à fond ! Et pour tous ceux qui ne sortaient pas assez vite, ils avaient sorti le carnet de PV. J'en ai marre, c'est incroyable, il ne devrait plus passer un convoi et on est toujours aussi « emm****. »
Ce ne sont pas les pales que j'ai trouvé sur ma route mais des cylindres qui ont traversé le village mercredi après midi !
Mais le hasard fait bien les choses, car hier matin voici ce qui s'est passé à la sortie du village. La route est bloquée par un convoi qui est sorti de la route. Pour le dégager, on est obligé de mettre en place une déviation de la déviation qui n'a plus lieu d'être pour que les convois annoncés puissent passer ! Et devinez, la déviation de la déviation renvoie ces engins sur leur route première...
Renseignements pris, un motard à un plan de route pour accompagner ces véhicules hors gabarit. Un ordre étant un ordre, il doit être exécuté même si la raison de cet ordre n'a plus lieu d'être ! J'en viens à être indulgent avec celui qui était excédé, je comprends quelque part : il savait qu'il gagnerait une heure en passant par l’itinéraire normal mais son devoir lui imposait de traverser ce défilé des temps modernes que constitue notre village !
IL faut tourner à gauche à angle droit
Remarquez les noms sympas des pancartes...
Quand on parle de réforme de l'État, la première chose serait d'alléger la réglementation générale et de redonner aux hommes de bon sens une responsabilité de décision ! Mme PH résument bien le sentiment général dans la commune : « A la préfecture, on se moque complètement des problèmes des gens et on a un vrai mépris des campagnes ! » Sentiment que je partage à 100 % !
J'ai proposé au maire un truc si cela perdure....A votre avis, 4 tracteurs avec leur remorques, stationnés à gauche au niveau du camion sur la première photo et 50 personnes derrière....Je rigole! Mais en France, il faut parfois en arriver là pour être compris!