Le premier du nouveau...
Je souris ce soir, usé par deux journées folles passées
entièrement dans le troupeau, en imaginant votre réaction en lisant le titre.
Le jour de l'an, est loin, le beaujolais nouveau encore plus...
Les vêlages ont repris. Je suis impressionné par la vitesse à laquelle les
vaches se préparent. Alors que nous arrivons lentement à la moitié de l'hiver,
ce sera vendredi, le fumier s'accumule dans les stabulations ! Je me suis
retrouvé coincé avec les trois vêlages en 12 heures de la nuit dernière.
Impossible de fermer les barrières des cases du fond pour isoler temporairement
les nouveaux nés avec leur mère. Prendre un accroc en pleine nuit n'est pas
passionnant. J'ai donc commencé aujourd'hui de sortir le fumier dans la fosse à
côté ! Ainsi ce soir, deux grandes cases sur trois sont comme neuves.
Litière propre et sèche. C'est beaucoup plus sain pour mères et veaux. Il faut
que je termine d'ici la fin de semaine. Ensuite, je devrai rouler le fumier
pour le mettre en tas dans un ou deux prés, en anticipant déjà les épandages de
la fin de l'année.
Dans les grandes manœuvres exercées sur le troupeau depuis 2 jours, l'une d'elles
m'a réconforté, même si elle me pose quelques problèmes. J'ai fouillé les trois
vaches que je soigne un peu plus. ( Soigner veut dire dans ce cas, donner à
manger beaucoup plus pour les finir.) J'étais sûr de l'une d'elles, mais j'ai
eu la surprise de découvrir que les deux autres étaient pleines également, dont
une assez tôt. Du coup, je ralentis la nourriture. Il me reste 4 ou 5 vaches à
confirmer avant de décider définitivement de ce que je fais. Mais si elles sont
toujours pleines, je vais me retrouver avec plus de vêlages que prévu. Cela
peut vous paraitre bien, mais en fait, cela me pose quelques problèmes. J'ai réduit
fortement les achats d'engrais et je ne peux donc pas relâcher trop d'animaux
au risque qu'ils aient du mal à être bien nourris sauf à hypothéquer la récolte
de foin pour l'année prochaine. Mais je ne me plains surtout pas de ce schéma,
je trouverai une solution. Trop d'éleveurs ici se plaignent d'avoir des vaches
vides ou décalées. Je constate juste qu'ayant été un des premiers à vacciner la
FCO, je suis, peut être avec beaucoup de chance tout de même, cela va ensemble,
un des premiers à retrouver un niveau de fertilité normal. D'autres facteurs
entrent en ligne de compte : en ayant un peu diminué le nombre de vaches, j'ai fait
un tri qui commence également à payer.
Il faut dire que j'ai payé le prix fort ces deux dernières années. J'ai eu
beaucoup de casse l'année dernière avec les veaux d'un taureau presque
exclusivement. Un taureau qui avait bien marché les années antérieures. Est-ce
la FCO comme me l'a suggéré un vétérinaire ? On peut se poser la question quand
on voit les effets sur les béliers ! Pourquoi n'y aurait-il pas des
conséquences sur les taureaux ?
Les taureaux ! C'est là la vraie raison du titre. Je n'ose pas encore
livrer ici ce que je pense de la conduite de la race... Cela risquerait de
surprendre beaucoup de lecteurs "éleveurs" ... Tout à l'heure, en
"étiquetant" le veau de 23 heures, j’étais admiratif de sa robe
blanche, si douce à la caresse. C'est incroyable, alors qu'il me paraissait si
sale à la naissance comme quelques heures après, ils peuvent être blancs immaculés !
J’aurai sans doute du mal à changer de couleur...
Mais mettre de la viande, c'est bien... Encore faut-il que les veaux
survivent ! Quand on est seul, on peut éventuellement faire téter un ou deux
veaux sur le genou, pas une vingtaine comme l'année dernière surtout quand
une crise cardiaque les emmène au bout de quelques jours... Le choix du père
est donc un exercice plus que compliqué. Autant le caractère viande, visible à
l'oeil nu est fortement héritable (Plus de 60 % si ma mémoire de cours de
génétiques reçus il y a 35 ans ne me trahit pas), c'est-à-dire qu'il y a une
très forte chance de le retrouver chez les descendants. Autant les qualités
maternelles ne se voient pas à l'oeil nu et ne sont pas héritables (moins de
30%) ! Donc quand on achète un taureau, à part quelques "voyeurs" qui
affirment tout connaître, il est quasi impossible de savoir ce qui va se
passer. D'autant que le nombre de combinaisons génétiques est tellement immense
que... Seul l'éleveur naisseur du veau sait si la lignée est maternelle ou pas !
Il y a donc un vrai chalenge en choisissant... Je n'en dis pas plus, même si...
A 5 heures, j'ai découvert le premier veau du nouveau taureau. Né tout seul
comme un grand, quelques minutes plus tôt ! Je connais bien la mère, je
peux donc me faire une première idée. Le veau, une fois debout, est immense.
Comme c'est une génisse, je suis content, car si les autres vêlages confirment,
voilà un taureau qui va me permettre d'augmenter le gabarit des vaches ! Plus
la vache est grande plus les chances de vêler facilement sont grandes. Autre
facteur important, elle a tété toute seule, très vite. Je sais que les puristes
vont me dire qu'il y a d'autres facteurs qui entrent en ligne de compte, mais j'ai constaté au fil des ans
qu'il y a des lignées beaucoup plus réactives que d'autres. Comme ce n'est pas un
facteur mesuré dans les schémas de sélection, on n'en parle jamais. Mais ce
sera un des facteurs clés de réussite des élevages à l'avenir, quand une
personne devra faire plus de 100 ou 150 vêlages, peut être 200, absolument seule.
Bon, je modère mon enthousiasme. Une hirondelle ne fait pas le printemps, tout
cela reste à confirmer. Mais cela donne le "la". "La" que
j'ai déjà vérifié avec le taureau acheté l'année dernière qui donne des
résultats étonnant sur les génisses. Comme quoi, l'aspect visuel compte pour
bien peu de choses, il est si laid... La clé de l'avenir de l'élevage charolais
n’est décidément pas là où certains le prétendent !